La honte se vit seule

Il sortait de l’ombre alors qu’elle l’attendait sous la clarté du soleil couchant. Il sourit. Ils marchèrent main dans la main. D’un pas léger. Sans se parler. Comme dans un rêve. Elle marcha sur ses peurs et fondit dans ses émotions. Une chaleur diffuse parcourut son être, douce, frémissante au contact de ces mains puissantes qui la caressaient.

Elle s’arracha un instant à l’enivrante passion de ces lèvres qui écrasaient les siennes et posa sa tête sur cette épaule réconfortante, comme pour suspendre ce moment de grâce, l’arracher à la furie du temps qui filait, effaçant sur son passage le goût des souvenirs fugaces. Sa main chercha le visage de Mourad, traça de ses doigts fins le contour de ses yeux sous les mèches rebelles et noires qui encadraient si joliment son regard attachant.

Soudain, le regard de Selma se déroba, changea de trajectoire et parcourut, à une vitesse vertigineuse, toute une chronologie de situations éprouvantes, pour se fixer finalement sur cet homme, soudain étrange, hurlant dans l’encadrement d’une porte sortie du néant, tel un radeau voguant dans le vide. Selma agita les mains, essayant de l’atteindre, mais le radeau disparut dans le néant, comme avalé par une force invisible.