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(...) Le monde entier s'est laissé envelopper par la symphonie guerrière dirigée par l'administration Bush. Pas de fausse note. En bons élèves intéressés par les dividendes éventuels, les sous-maîtres et tous les sous-quelque chose se sont engagés dans la lutte contre le " terrorisme ". Un bien vilain mot qui peut désigner ce et qui on veut, du moment qu'il dérange! Chaque pouvoir a le sien.
(…) À mesure que les hypothèses sur les attentats s'échafaudaient dans les rédactions et les salles de nouvelles, les rumeurs s'emparaient de la rue. La menace s'étendait partout en Occident. Elle est arabe, musulmane. (…) Les journalistes aux ordres n'auraient pas mieux fait en matière de propagande. Ce 11 septembre 2001 me ramena brutalement en 1991, lors de la guerre du Golfe. (…) En moins d'une journée fatidique, on avait accusé, jugé et condamné les musulmans et les Arabes et mis en surbrillance leur esprit malveillant à l'égard de la civilisation occidentale.
(…) Il n'y a que la violence qui engendre la violence. Nous l'avons appris en Algérie où après dix ans d'affrontements sanglants, quelques 200 000 morts, des milliers de disparus, des veuves et des orphelins en masse, des milliards de dollars de dégâts, un traumatisme et un désarroi incommensurables (…) Alors quand on parle de l'Algérie debout, la seule qui me vienne à l'esprit date d'au moins 20 ans. (…) Certes, nous ne vivions pas dans l'idéal en terme de modèle de société, mais encore une fois, nous ne pouvions faire abstraction des contingences historiques et sociales de notre pays. Et pour cause, la crasse coloniale qui avait mis 130 ans à s'implanter dans les esprits exigerait sûrement quelques générations pour disparaître. (...) notre indépendance n'avait pas de prix et ne pouvait souffrir d'aucune comparaison avec notre passé de colonisés.
(…) C'est dans les démocraties occidentales que les dictateurs préfèrent la villégiature! Et c'est là qu'ils s'en vont régulièrement faire leurs emplettes! C'est là qu'ils s'en vont retaper leur santé! Dans les hôpitaux rutilants de Genève, Paris, Londres ou Washington. (…) Enfin, c'est là, au Nord, que nos dictateurs ont leurs appuis! Ceux qui les protègent de la colère des populations, qui leur fournissent les plans pour opprimer ces populations et les armes pour les tuer, qui leur octroient les crédits qu'ils détournent et imputent à leur peuple sous forme de dettes internationales.
(…) Il aurait été mille fois préférable qu'un mur de fer soit édifié entre nos deux mondes, histoire de balayer votre innocence, de ne laisser aucune chance à l'alibi de l'ignorance, du silence… Nos misères viendraient s'y cogner dans un vacarme si fracassant que vous finiriez par écouter. Malheureusement, le mur qui nous sépare n'est pas de fer et ne peut résonner d'aucune façon (…) Sinon comment expliquer que 3 000 victimes américaines peuvent causer tant de bouleversements et changer la face du monde alors que 800 000 victimes rwandaises, tuées collectivement dans des conditions atroces, n'ont même pas eu droit à une minute de silence de la part du monde civilisé, le Nord, en l'occurrence. (…) Il n'est pas vrai qu'on s'habitue à la souffrance, à l`humiliation, au mépris. Qu'on apprivoise la douleur, la peine, la faim. Qu'on supporte mieux la misère de ce côté-ci de la planète. Qu'on est mieux préparé aux drames, au deuil, à la maladie dans ces pays où l'on meurt rarement de mort naturelle. Jamais! (…) Au Sud, les populations n'ont pas droit à la parole, leurs colères sont proscrites comme des délits, leurs protestations comme des crimes punissables, et leurs droits sont invariablement confisqués. (…) le tout, sous l'œil consentant d'une ONU piratée qui ne se déploie qu'à la volonté des grandes puissances, véritables génératrices de ces conflits…
(…) C'est dans cette logique, qu'une main lance les bombes et l'autre les sacs de farine!
Que les bombardements créent des réfugiés et les employés humanitaires des camps de misère pour les accueillir!
Que les puissances décrètent des embargos qui détruisent des peuples et délèguent l'ONU pour négocier leur survie! (…)
Et ne me parlez surtout pas du voile des musulmanes qui vous mobilise le temps d'une campagne! Si celles-ci sont prisonnières de quelque chose, c'est d'abord de l'état de précarité de leurs sociétés, sans droits, sans soins, sans éducation! Le fameux voile, cet alibi qui, de nos jours, fait recette à tous les coups! À tel point qu'il en est devenu à la fois un alibi au service des dictatures autoproclamées démocraties et un cheval de Troie au service des intérêts stratégiques occidentaux…